Placer la trésorerie d’entreprise n’est pas un simple confort : c’est un outil stratégique. Trop souvent, ces liquidités restent immobilisées sur un compte courant, où elles perdent de la valeur sous l’effet de l’inflation. En 2024, l’inflation annuelle en zone euro se situait autour de 5 %, ce qui signifie qu’un capital de 100 000 € placé à 0 % perd mécaniquement 5 000 € de pouvoir d’achat par an.
La trésorerie excédentaire d’une entreprise, ce n’est pas une question secondaire, mais bien un choix de pilotage financier. Encore faut-il le faire avec méthode. Le dirigeant doit trouver le bon équilibre entre sécurité, liquidité et rendement, en tenant compte de ses besoins et de l’horizon de placement.
Poser les bases : trésorerie, fonds de roulement et besoins en liquidité
Avant de chercher le meilleur rendement, il faut d’abord sécuriser les fondamentaux. Une entreprise doit conserver une trésorerie de sécurité équivalente à environ trois mois de charges fixes ou à 30 à 40 % de l’excédent global. Cette réserve immédiate protège contre les aléas : retard de règlement d’un client, hausse imprévue des coûts, crise sectorielle.
Une fois ce coussin mis en place, la trésorerie excédentaire peut être ventilée selon trois horizons :
- Court terme (< 12 mois) : priorité à la liquidité et à la disponibilité rapide.
- Moyen terme (1 à 3 ans) : recherche d’un compromis entre rendement et sécurité.
- Long terme (> 3 ans) : tolérance à une volatilité plus forte en échange de perspectives de rendement supérieures.
Cette approche par horizon évite deux erreurs fréquentes : bloquer inutilement l’ensemble des liquidités ou, à l’inverse, renoncer à tout rendement par excès de prudence.
Court terme : préserver la liquidité sans négliger le rendement
Lorsque l’entreprise doit garder une partie de son cash disponible immédiatement, elle peut s’appuyer sur plusieurs supports :
- Fonds monétaires : très liquides, peu risqués, ils offrent en 2024 un rendement net voisin de 3,5 à 3,8 %. Idéal pour placer quelques semaines ou mois sans prendre de risque excessif.
- Comptes à terme (CAT/DAT) : le capital est bloqué pour une durée définie (6, 12 ou 24 mois). En échange, l’entreprise bénéficie d’un taux fixe, généralement compris entre 2 et 4 % selon la durée.
- Comptes excédent professionnels : rémunération modeste (0,5 à 1,5 %), mais liquidité totale.
Exemple : placer 100 000 € sur un compte à terme rémunéré à 3 % brut pendant 12 mois permet de générer 3 000 € d’intérêts bruts. Après application de la flat tax (30 %), le gain net s’élève à 2 100 €, soit une façon simple de compenser partiellement l’érosion monétaire.
Moyen terme : optimiser rendement et sécurité
Pour une immobilisation de 1 à 3 ans, le dirigeant peut viser un meilleur équilibre entre rendement et sécurité. Plusieurs solutions se démarquent pour placer la trésorerie d’entreprise :
- Fonds obligataires (États solides ou entreprises Investment Grade) : rendement attendu autour de 4 à 5 %, avec un risque de crédit limité.
- Contrats de capitalisation : proches de l’assurance-vie, ils offrent une grande souplesse, la possibilité de diversifier entre fonds euros sécurisés et unités de compte (actions, obligations, immobilier), et une fiscalité optimisée pour les personnes morales soumises à l’IS.
- SCPI en usufruit temporaire : un outil puissant pour investir dans l’immobilier tertiaire (bureaux, commerces, logistique). L’usufruit temporaire permet de bénéficier de rendements nets de 12 à 22 % sur une période de 3 à 10 ans, avec une imposition adaptée.
Long terme : viser la performance avec discernement
Lorsqu’une entreprise peut bloquer une partie de ses liquidités au-delà de 3 ans, le spectre d’investissement s’élargit et le potentiel de performance augmente.
- Produits structurés : instruments financiers construits pour délivrer un rendement conditionnel, souvent compris entre 6 et 10 % par an, avec une protection partielle du capital.
- Investissement boursier (CTO, ETF, actions directes) : historiquement, les actions offrent une performance annuelle moyenne de 6 à 8 %, mais avec une forte volatilité à court terme.
- Crowdfunding immobilier ou corporate : permet de financer des projets d’entreprises ou de promoteurs immobiliers. Rendement attractif (5 à 10 %), mais risque de défaut et illiquidité à prendre en compte.
Ces supports doivent rester marginalisés dans un portefeuille d’entreprise, par exemple 10 à 20 % maximum de l’excédent, afin de limiter le risque de perte en capital.
Digitalisation : vers une gestion intelligente et dynamique de la trésorerie
Placer la trésorerie d’entreprise n’est plus seulement une question de supports. C’est aussi une affaire d’outils numériques. Les solutions de cash management digitalisé permettent aujourd’hui :
- de suivre en temps réel les flux de trésorerie,
- d’anticiper les besoins et excédents,
- de répartir automatiquement les liquidités entre plusieurs supports,
- de réaliser des arbitrages rapides selon l’évolution des marchés.
Un dirigeant équipé d’une telle plateforme gagne en réactivité et transforme une gestion autrefois manuelle et statique en une tactique financière proactive.
Panorama des horizons et supports de placement
Horizon | Objectif principal | Supports adaptés |
Court terme | Liquidité immédiate | Fonds monétaires, comptes excédent pro, comptes à terme (CAT) |
Moyen terme | Compromis rendement / sécurité | Fonds obligataires, contrats de capitalisation, SCPI en usufruit |
Long terme | Rendement élevé avec tolérance au risque | Produits structurés, investissement actions/ETF, crowdfunding immobilier ou corporate |
Digital | Optimisation en temps réel | Plateformes fintech de cash management |
Conclusion : une trésorerie active au service des ambitions de l’entreprise
Placer la trésorerie d’entreprise n’est pas qu’une affaire de rendement. C’est une démarche stratégique, qui consiste à marier anticipation, sécurité et performance.
Un bon dirigeant adoptera une répartition équilibrée : sécurité et liquidité pour le court terme, croissance maîtrisée sur le moyen terme, et performance sélective sur le long terme. En ajoutant à cela les atouts de la digitalisation, la trésorerie cesse d’être un capital dormant pour devenir un véritable moteur de croissance.
Cependant, chaque entreprise étant unique, il est recommandé de consulter un conseiller en gestion de patrimoine ou un expert-comptable afin d’adapter cette stratégie à sa situation fiscale, juridique et économique.
Le meilleur moment pour placer la trésorerie de votre entreprise n’est pas demain, mais aujourd’hui.
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Crédit photo : @PIXABAY